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Discours prononcé par Marcel Neven, le bourgmestre du Visé, à l'occasion du centenaire du début de la guerre 1914 - 1918

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"Le début du XX ème siècle est souvent qualifié de "belle époque" même si cette expression ne reflète guère les conditions de vie de l'ensemble de la population. Il n'empêche, si on compare ces années à celles qui suivirent, le début du siècle était bien la belle époque.

Le 28 juin 1914, le prince héritier de l'empire d'Autriche et son épouse sont abattus à Sarajevo par Princip, un anarchiste inconscient de la portée de son acte. Il est vrai que cet assassinat ne fut qu'un prétexte tant la tension était grande entre les puissances, due notamment au désir de suprématie en Europe et dans les colonies. Mais qui savait, en `belgique, qui savait à Visé, où se trouvait Sarajevo? Probablement très peu de nos concitoyens connaissaient-ils même l'existence de cette ville. Et pourtant... Certes, certains esprits éclairés étaient inquiets. Par exemple, Liège avait été entourée de nombreux forts.

Pourtant, la majorité de nos concitoyens du début du XXème siècle pensaient ne rien avoir à craindre.

Les grandes puissances ne nous avaient-elles pas imposé une neutralité qui à l'origine était surtout destinée à se protéger de la France.

Non seulement cette neutralité était imposée mais surtout garantie par ces grandes puissances.

Hélas, l'Allemagne et son empereur Guillaume II ne l'entendaient pas de cette oreille puisqu'ils estimaient pouvoir traverser notre pays éventuellement par la force. Notre roi, Albert 1er, moins de 5 ans après son entrée en fonction et notre parlement ne purent admettre cette exigence et s'opposèrent à ce dessein.

La suite est bien connue. Les troupes allemandes pénétrèrent à Liège mais le retard encouru permit à la France de résister avec efficacité, notamment lors de la bataille de la Marne. La suite c'est aussi une guerre sans fin qui fit pas loin de 10 millions de victimes et le double si l'on tient compte des dégâts de l'épidémie de grippe espagnole et qui fut suivie 20 ans plus tard par un autre conflit encore plus sanglant tant pour les civils que les militaires. 

Les Visétois, le 4 août 1914, ne se doutaient pas que notre petite ville, historiquement orientée plutôt vers l'empire que vers le reste de la future Belgique puisqu'elle avait appartenu à la Principauté de Liège, territoire de l'empire germanique, allait être le début de ce carnage.

Premier drame, là où plus tard allait se réaliser la place Reine Astrid, les deux premiers gendarmes furent abattus : Jean-Pierre THILL et Auguste BOUKO.

Il y a quelques jours fut inauguré un nouveau monument conforme à celui qui avait été dressé après la fin de la guerre mais détruit par les nazis en 1942. Ce fut pour nous l"'occasion d'accueillir 10 personnes membres des familles des deux victimes. Et je tiens à préciser que c'est grâce aux préparatifs de cette commémoration du centenaire qu'il nous fut donner de les rencontrer et les accueillir. L'association des Anciens Gendarmes a joué un rôle important.

La commémoration de ce 100ème anniversaire est certes un devoir, mais nous ne nous doutions pas que, en plus, cela serait l'occasion de nouer des contacts avec les membres des familles des victimes dont, faut-il le rappeler, l'une fut enterrée au cimetière de Lorette. Je tiens à les remercier de leur présence.

La nuit précédant le 4 août, le pont de Visé fut détruit avec l'aide de civils et le 12ème de Ligne prit position sur la rive gauche.

Très malheureusement, deux fantassins : Lodewijk MALTUS et Prosper VAN GASTEL périrent en ce preier jour de guerre. Triste privilège pour notre ville d'avoir été le théâtre de ces premières pertes humaines, avec le cavalier FONCK à Thimister.

Nous avons également pu retrouver grâce au comité des fêtes de Devant-le-Pont des membres des familles des victimes. Je les remercie également de leur présence. Je tiens à souligner que, tant les associations de gendarmes, anciens et en activité, que le comité des fêtes de Devant-le-Pont lors des fêtes de juillet, rendent régulièrement un vibrant hommage à ces 4 victimes. La Ville de Visé y est bien entendu toujours associée.

Un siècle plus tard, la question de l'utilité de cette guerre reste posée. La réponse est simple. Elle est évidemment négative. Les négociations doivent toujours prévaloir.

Pour des raisons que je viens d'invoquer, la Belgique ne souhaitait absolument pas ce conflit. Peut-être était-elle d'ailleurs la seule pari les belligérants à ne pas nourrir l'ombre d'une velléité.

La guerre 14-18, appelée et l'appellation est devenue ironique la "der des der" fut d'autant plus inutile que le conflit reprit deux décades plus tard. Il serait cependant erroné d'ignorer les efforts entrepris en faveur de la paix. Après le traité de Versailles, imposé aux Allemands, Aristide BRIANT, le premier ministre français et son homologue allemand Gustav STESEMANN, conclurent le pacte de Locarno en 1925 marquant la réconciliation de la France et de l'Allemagne et en 1928 les accords BRIAND-KELLOG, secrétaire d'état américain bannirent la guerre. Ils furent ratifiés par plus de 60 pays. Hélas, la crise économique de 1929 remit tout en question.

Et la guerre 40-45 fut encore plus terrible. Mais du moins en Europe occidentale, eut-elle des lendemains beaucoup meilleurs grâce à la construction de l'Europe qui rassemble actuellement 28 pays opposés par de nombreuses guerres pendant des siècles, aujourd'hui unis dans une structure peut-être imparfaite, mais pacifique. Il y aura bientôt 70 ans au moins dans cette partie du monde que la paix est installée durablement. C'est une conclusion qui peut paraître positive. Mais fallait-il tant de millions de victimes pour y parvenir? Question sans réponse ou réponse trop évidente.

Pour les visétois, l'agression nous valut plusieurs dizaines de morts et aussi l'incendie et la destruction de notre Ville. Ce désastre sera commémoré dans 11 jours. Aujourd'hui, nos pensées vont aux gendarmes BOUKO et THILL et aux fantassins MAULUS et VAN GASTEL. Ils furent les premières victimes d'un carnage inouï et nous souhaitons que les jeunes générations ne soient plus jamais les acteurs de ce qui fut qualifié de terrible boucherie. En raison de l'horreur des atrocités perpétrées, il est capital de se souvenir tant par le respect pour les victimes que pour éviter de nouveaux affrontements.

Je tiens à remercier Monsieur le Représentant du Roi, Monsieur le Gouverneur, toutes les autorités civiles et militaires de leur présence et tous les Visétois qui ont tenu à être à nos côtés et je les invite à se joindre à nous en la salle des fêtes de l'école de Devant-le-Pont et à venir prendre le verre de l'amitié et du souvenir"

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