Un des 10 personnages représentés dans les personnalités de la Basse-Meuse du 20e s. au musée de Visé est le journaliste et écrivain René Hénoumont, qui fit de nombreuses chroniques dans le Pourquoi Pas. Natif de la Préalle, ce quartier sympathique et dynamique des hauteurs de Herstal, il parle souvent de Visé dans son livre « Café Liégeois, récit, terres d’enfance ». (Edition A.C.E., 276 p., 1984). Il divisa son livre en 4 parties. Il évoque la danse locale de la Basse-Meuse, le Cramignon. Il rappelle que dans les années 60 pour le compte de la télévision (diffusé pour les 50 ans de la Première guerre sur la RTB (F) en 1964) il mena des interviews de plusieurs visétois comme M.Brouha père, M.Georges, M.Fraikin et le vieux capitaine M.Cerfontaine en posant UNE UNIQUE question : comment était votre premier allemand en 1914. Ce dernier répondit avec conviction : une brute ! Rien n’était oublié et moins encore pardonné comme les massacres, les fusillés, les torturés, les incendies à Visé….
Voici ce qu’il écrit (p.169) : « dans les années 1930, les ruines de Visé, villette en aval de Liège, était le but des promenades dominicales. Je me souviens très bien des baraquements de bois, don du Roi Albert, où durant plus de quinze ans, les Visétois attendirent le règlement des dommages de guerre par l’Allemagne….Les dommages de guerre auront été au centre des conversations de mon enfance et de ma jeunesse. Les maisons (de la Préalle) étaient fissurées par la mine, deux guerres, les bombardements allemands ou alliés achevèrent un grand nombre. En août 1914, Visé entre autres allait payer très cher la résistance imprévue des troupes belges et la défense des forts de Liège. Le « non » du roi Albert à son cousin Guillaume II, se souciant, comme d’une pomme de la neutralité belge, suscita un terrorisme dont l’état-major allemand espéra jusqu’à la fin du mois d’août 1914 qu’il inciterait la Belgique à s’incliner et à cesser la bataille. Le 4 août à l’aube, les Allemands investissaient Visé. Les premières pertes, quelques soldats basculés dans la Meuse (des uhlans), allaient tout précipiter et accréditer la légende des francs-tireurs invoquée par la suite pour répondre à l’indignation mondiale ; Dès le premier jour du conflit, les Allemands fusillèrent 15 otages ; ils en massacrèrent vingt autres dans la semaine ; Le 10 août, l’église (la Collégiale) fut brûlée et le 16, Visé fut mise à sac, chaque maison pillée, les femmes et les enfants chassés dans la nuit, les hommes (617 exactement) déportés en Allemagne. Quatre ans durant, Visé fut une ruine désertée.
La rumeur a-t-elle amplifié les atrocités ? L’Allemand, coupeur de mains, une légende, Oui, mais en 1960, tout au long de la frontière, j’ai recueilli des témoignages bouleversants et d’une grande sobriété. C’est le fils, alors enfant, qui vit son père tomber devant le peloton. C’est le père qui vit ses fils achevés à coups de baïonnette ; En faut-il plus ?
En novembre 1918, le kaiser traversa Visé en ruines. (nDLR plus exactement Mouland). Il se réfugiait en Hollande. Je me souviens bien de Guillaume II, on nous le montrait aux actualités cinématographiques , débitant du bois dans le parc de son château batave où il tuait le temps…..la salle huait et sifflait. J’ai toujours été persuadé que le grand exode de 40 fut suscité par les évènements d’août 1914. Les populations frontalières déguerpirent pour « ne plus voir cela »
Hommage à Janina Tihon d’Eben, qui œuvra à la ville de Visé et qui avait tous les romans de cet auteur.
J.P.LENSEN, secrétaire de la S.R.A.H.V.